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Au revoir les notes sur 20,… la classe renversée préfère les bons points !

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Dans la classe renversée, puisque les étudiants produisent eux-mêmes le cours en se connectant sur internet ou en consultant des ouvrages disciplinaires, il n’est plus nécessaire de focaliser le contrôle continu sur la seule évaluation de leurs connaissances. On réservera cela à l’examen final. La méthode de contrôle continu qui est choisie est alors celle de l’attribution de points, additionnables sans maximum de manière à obtenir des scores à la place de la sempiternelle note sur 20. Utiliser des points en guise de scores, comme on utilisait auparavant à l’école primaire des « bons points » n’est pas un problème. Il est toujours possible ensuite de les transformer en notes sur 20 à la fin du module, ne serait-ce que pour pouvoir les moyenner, éventuellement, avec celles d’un devoir surveillé ou d’un exposé qui serait noté en conditions « normales ».

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Les scores correspondent à une addition de points que les étudiants obtiennent, soit à titre individuel, soit par le travail en équipe. Ils constituent un véritable capital qui ne demande qu’à être bonifié. La différence principale qu’ils présentent avec la notation sur 20 (considérée comme la notation classique) est qu’ils ne sont soumis à aucun maximum. On ne peut ni les réduire, ni les soustraire. Une fois acquis, un point l’est jusqu’au bout du semestre. De même, il n’est pas possible d’en retirer du capital d’un élève, donc pas de points en moins, ni de malus. Le principe est celui du salaire ou de la récompense. C’est une méthode de mesure, bien plus qu’une méthode de notation, qui correspond davantage à ce que l’on peut appeler une évaluation progressive qu’à une évaluation de niveau. Bref, ils ne mesurent pas le niveau du but atteint, mais la progression pour s’en approcher.

Les étudiants ont été élevés aux notes sur 20 : Depuis que je suis toute petite, j’ai grandi dans un système où tout est classé… des différentes écoles aux meilleurs élèves. Malheureusement, j’ai l’impression que ce système de classement est profondément ancré en nous. Je me souviens avoir toujours voulu être la première de ma classe et même encore maintenant, après chaque examen, chaque DS, presque chacun d’entre nous souhaite connaître la note des autres, comme si, sans cette comparaison, la nôtre ne voulait plus rien dire, comme si l’on ne pouvait être fier de nous qu’à l’unique condition d’avoir une meilleure note que les autres !

La quantité de points donnés par le professeur pour faire évoluer le score de chaque étudiant, toujours vers le haut, dépend de la quantité et de la qualité du travail fourni par celui-ci, individuellement ou en équipe. Le niveau du score permet de mesurer les capacités d’un étudiant à répondre aux attentes de l’enseignant. Il permet aussi de récompenser l’exercice de certaines compétences. A titre d’exemple, l’enseignant peut attribuer 1 à 2 points pour la simple présence à un cours (l’assiduité) ou pour avoir répondu dans les temps impartis à une question posée (la participation et le respect des livrables). Cela peut se faire en classe ou par mail entre deux séances. Cette quantité de points attribués peut atteindre 5 ou 10 si l’attitude en cours ou la pertinence de la réponse est jugée de très bonne qualité par l’enseignant. Il n’y a pas de barème gravé dans le marbre ou sur quelconque parchemin. Le tout est de rester équitable en donnant à l’étudiant et à l’ensemble des membres de son équipe, un nombre de points qui soit proportionnel à la quantité et à la qualité du travail fourni. Toutes les occasions, sans aucune exception, sont bonnes pour attribuer ces points, que ce soit à titre individuel, par binôme ou par équipe : la qualité des questions formulées lorsque les étudiants d’un groupe interrogent ceux d’un autre groupe ou lorsqu’il sollicite le professeur lui-même, la pertinence de leurs réponses et de leur argumentation, la justesse des schémas qu’ils produisent sur les tableaux, la clarté de leurs explications quand ils exposent certaines parties du cours,… Pour toutes ces prestations, la quantité de points donnés peut varier de 5 à 20.

Chaque semaine, le score de chaque étudiant augmente et ceci de manière progressive. En fin de module, on peut observer une différence importante, du simple au quadruple entre ceux dont les scores sont les plus hauts et ceux dont les scores sont les plus bas. Un simple graphe permet de visualiser l’ensemble des scores de la promotion, ce qui est pratique pour les réunir ensuite en nuages ou en clusters. Cela permet d’identifier les étudiants ayant à peu près le même capital de points et leur attribuer ensuite par transformation une note sur 20.

Tous mes étudiants n’aiment pas les bons points :  Ce système de points ne serait-il pas un peu injuste ? Par exemple, je trouve assez aberrant qu’il y ait des points pour les étudiants qui vous posent des questions par mail ou même en cours. Jusqu’à ce jour, je n’ai pas eu réellement l’utilité de vous demander quoi que ce soit étant donné ma bonne compréhension du fonctionnement du cours, des données trouvées sur internet ou dans les livres pour élaborer notre chapitre, le tout m’ayant paru clair sans qu’il y ait besoin de vos explications en complément. Avoir des facilités de compréhension devient alors pénalisant. Je pense aussi que le fait qu’un élève ayant eu des points pour avoir écrit, puis expliqué au tableau, l’un des exercices est injustifié. Sur deux exercices proposés, il est totalement impossible que tous les élèves aient une participation égale, malgré le fait que les recherches, les connaissances et la compréhension aient été faites ensemble et de manière équivalente.

Le bienfait ou pas de la suppression des notes, tout au moins lors de l’acte même de l’évaluation, n’est pas un discours nouveau. Idem pour leur remplacement par d’autres systèmes de mesure et de notation. Il n’y a pas de recette miracle en la matière, pas plus dans la classe renversée qu’ailleurs. Toutes les idées sont bonnes à prendre et à expérimenter. Dans son ouvrage « L’éducation réinventée »[1], Salman KHAN propose par exemple d’éliminer toute sorte de notes, arguant qu’elles n’ont plus leur place dans un système d’éducation qui est basé sur la maîtrise des connaissances. Il propose de baser l’évaluation des élèves sur une rédaction de ce qu’ils auraient appris et du chemin parcouru pour y parvenir,… une sorte de portfolio qui retrace leur apprentissage tout au long de leur scolarité. Ceci n’est pas très surprenant pour quelqu’un fortement inspiré par la culture orientale. Il y ajoute un aspect totalement négligé dans les évaluations classiques mais particulièrement important, celui de la volonté et de la capacité qu’ont les élèves à aider les autres. Ceci parait logique tant les classes sont des lieux d’apprentissage qui font qu’un élève altruiste deviendra sans doute un collègue altruiste. Voilà une compétence tant attendu par les institutions et entreprises, futurs employeurs, et qui mériterait d’être évaluée dans les prochaines années d’expérimentation de la classe renversée. Une idée qui fait son chemin…

[1] Salman KHAN. (2013). L’éducation réinventée. Une école grande comme le monde (Editions JC Lattès)


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